Atelier d'écriture
29 mars 2010
texte 15
J'ai peur que...
J'ai peur que le monde de la finance nous amène
dans le mur. C'est-à-dire qu'il soit à l'origine d'un conflit
mondial. Un conflit qui naitra des frustrations, des désespérances,
de l'expansion incommensurable de la misère. Une misère qui
atteindra toutes les couches sociales à l'exception des très
riches. Et encore, j'ai des doutes même à ce niveau.
Tu sais, je n'aurai plus peur de prendre le tram malgré
ce qui m'est arrivé Non pas que des policiers, à moins
que ce soient des vigiles, sont embarqués à bord, mais parce
que j'ai pris confiance en moi par la pratique de sport de combat. Je n'y
croyais pas trop au début et puis au fur et à mesure de l'évolution
de ma pratique, j'ai mesuré les changements qui s'opéraient
en moi. Et cela ma réconforté.
Je n'aurai pas eu peur que tu oses t'affronter à ton
patron car il faudrait
bien, un jour ou l'autre, crever l'abcès. Ta situation
est intenable et cela te rend malade, j'ai peur maintenant de te voir te
recroqueviller, t'auto-détruire, te rendre malade au plus profond
de toi. A moins que tu redoubles ta consommation de cigarettes qui est déjà
passablement excessive, pensant par là, contourner ton mal-être.
Par contre,
Je n'ai plus peur de mes peurs grâce à ma rencontre
avec la pensée taoïste qui m'a remis sur la Voie. J'y étais
dans mon enfance et les affres de la vie d'adulte m'en avaient éloignée.
Mais ce n'était que superficiel. La peur naît de la crainte
de ne pas trouver de porte de sortie, il me semble, à ce qui nous
angoisse. J'arrive maintenant à me retirer du monde tout en y restant.
Ce n'est pas facile tous les jours mais j'y arrive d mieux en mieux. La peinture
et l'écriture sont mes deux armes.
Atelier d'écriture
12 avril 2010
texte 16
J'attends que...
J'ai tente huit ans et j'attends que le printemps
arrive sous le regard de la Vénus de Botticelli. Les fleurs du tableau
n'ont pas de parfum mais peut-être qu'un jour un artiste trouvera le
moyen de donner vie aux objets de son tableau.
Y compris dans les senteurs, les parfums des oranges et autres
agrumes.
Pour l'heure, je profite de mon temps libre puisque je suis
en vacances et cette visite du musée de Florence, visite virtuelle
via internet, je l'effectue sous la pleine lune qui donne à la campagne
une atmosphère étrange, une luminosité de temps de décadence
surréaliste à la Magritte. J'entends au loin le bruit d'une
puissante moto sur l'autoroute qui monte en régime à faire
exploser les vitres des maisons. Botticelli le vit mal et moi aussi. Je rentre
à la maison, s'en est trop.
J'ai tente neuf ans, j'attends que le meilleur arrive puisque
le meilleur est toujours à venir paraît-il ?... Il va falloir
que je prenne mon mal en patience. Ma jeunesse est bien loin et le meilleur
a failli arriver. Je l'ai souvent espéré, suscité, appelé
de mes vœux mais nada. J'aurais peut-être dû mettre un cierge
à St Antoine ou à je ne sais quel saint, il y en a tant, pour
me redonner de l'espoir !...
Mais je crois avoir trouvé la solution.
Je ne vais rien attendre. Ce sera la bonne attitude. N'espérant
rien, ne
désirant rien, ayant pour seul objectif que de vivre
chaque instant dans sa
plénitude, de prendre la vie du bon côté
sans chercher à la diriger, ce qui
adviendra sera ainsi toujours le meilleur dans l'instant puisque
je ne désirerai pas qu'il soit meilleur qu'avant. Il sera, point.
J'ai six tente ans, j'attends de trouver ma voie m'a dit un
ami. Et bien moi, lui ais-je dit je n'attends que le bus à l'arrêt;
je n'attends que la pluie cesse de tomber pour sortir me promener; je n'attends
que le coucher du soleil pour prendre l'apéro; je n'attends que le
joli mois de mai pour cueillir du muguet; je n'attends que la marée
basse pour aller ramasser des coquillages; je n'attends que la pleine lune
pour retrouver ma brune.
Mais je n'attends pas le bus qui est en grève; je n'attends
pas que la pluie reprenne pour arroser mes fleurs; je n'attends le coucher
du soleil pour savoir que la nuit va arriver; je n'attends pas le jolie mois
de mai pour seulement cueillir le muguet; je n'attends pas que la marée
basse soit basse pour me baigner; je n'attends la pleine lune pour marcher
dans la campagne.
Alors, je ne voudrais pas attendre la grève des bus
pour marcher; je ne voudrais pas que la pluie fasse grève pour les
fleurs; je ne voudrais pas que le soleil n'aille plus se coucher car il ne
se lèverai plus alors!; je ne voudrais pas attendre le moi de mai
si je savais que je ne pourrai plus faire ce qui me plait ;je ne voudrais
pas attendre la marée basse à l'heure de la marée haute;
je ne voudrais pas attendre la pleine lune sous un soleil de plomb.
Et enfin je n'attends pas encore la fin de la faim qui taraude
les estomacs des
millions d'humains, ce sera pour une autre fois, une autre
fin. L'écran noir
total et définitif.
Atelier d'écriture
19 avril 2010
texte 17
On disait de lui...
On disait de lui qu'il était le prince de
l'esbroufe. Mais ce n'était qu'apparence. Il était
plutôt dans un jeu sociétal. Et cela l'amusait bien
lorsqu'il trouvait son public. Pour qui le connaissait dans
son intimité comme moi, qui l'avait vu vouloir rester dans l'ombre
alors qu'il avait la capacité et les qualités d'un responsable
pouvant se permettre d'affronter haut-la-main des situations plus que difficiles,
il était dans cet instant à l'image de sa vrai nature. Une
nature double et contradictoire.
Par contre, personne n'a jamais dit de lui qu'il pouvait être
l'une et l'autre de ces facettes. La plupart du temps il était perçu
comme un m'as-tu-vu, soit soit comme une personne manquant d'assurance. Et
à leurs yeux, c'était la raison de son attitude lorsqu'il se
posait en retrait. Et lorsqu'il était dans l'esbroufe, à leurs
yeux c'était pour se donner une contenance, se rassurer.
Moi, je savais le combat qu'il menait en son for intérieur.
Cette double nature antagoniste lui posait bien des problèmes. Et
c'est sa compagne qui souvent servait de tampon.
On disait d'elle qu'elle était son paratonnerre. Son
parachute. Elle lui permettait de retomber sur ses pattes dans
certains cas ou de s'éclipser dans d'autres cas. De fait, ils s'en
amusaient et c'était un jeu qui parfois prenait le pas sur les événements.
Par contre personne n'a jamais su qu'elle en souffrait car
cela prenait une énergie et du temps qu'ils auraient préféré
garder pour leur vie intime. Ils avaient déjà suffisamment
d'obligation de par leur fonction au sein du gouvernement de la
principauté. Cela faisait des années que cela durait et les
années passant, cela devenait de plus en plus difficile à gérer.
Qui aurait pu penser que les contraintes de l'âge et du temps viendraient
mettre un grain de sable fatal qui bouleverse toute une vie.
C'est alors cette double nature qui vint à son secours
et leur permit de se sortir d'un dilemme qui aurait été
inacceptable aux yeux qui les observaient constamment. Ils se
retirèrent sur la pointe des pieds en profitant d'un voyage aux antipodes.
Peut-être aurait-il fallu choisir une autre sortie mais
avaient-ils le choix ?
Cela leur permit de commencer à vivre leur propre vie
tels qu'ils l'entendaient.
Fini l'esbroufe, fini l'obligation de se surpasser pour épater
la galerie. Ils pourraient enfin se donner entièrement à la
construction de leur relation intime. Ils n'avaient de compte à rendre
à personne sauf à eux-mêmes. Et cela était autrement
plus difficile mais excitant.
Les gens disent encore aujourd'hui un tas d'absurdités
sur leurs comportements sauf une voix ou deux qui, plus lucide, comprennent
le véritable enjeu de leur choix de vie. Cela, pour les privilégiés
qui connaissent la fin de leur histoire. Pour la grande majorité,
ils n'ont pas eu le courage le courage ni la compétence que certains
leur prêtaient. La critique est trop facile rétorquaient les
plus lucides.
Par contre, les gens ne disent jamais qu'ils ont eu raison
de quitter le navire de la vie public pour se concentrer sur leur propre
vie. Qu'y a-t-il de mal à cela ? Il semblerait que ce qui lui était
reproché soit aujourd'hui regretté, comme si le théâtre
de la scène publique était en manque. L'esbroufe n'était
plus perçu comme quelque chose à réprimander. Cela devait
permettre à certains d'oublier leurs propres problèmes, semble-t-il.
Et puis certains caricaturiste étaient en manque d'inspiration.
Moi, je n'ai su de leur histoire que la réalité
profonde qui a échappé aux médias, bien heureusement
pour eux, et à tous les chiens qui aboient lorsque la caravane passe.
Et j'en suis d'autant plus heureux que c'est en partie grâce à
moi qu'ils ont fait ce choix d'échapper aux regards du monde. Je leur
disais toujours: pour vivre heureux, il faut vivre caché. Ils en riaient,
blaguaient.
Car cela ne leur était pas indifférent ni une
expression inconnue. Je savais qu'en leur for intérieur, ils adhéraient
même assez bien à cette vision des choses. Mais je ne pensais
pas qu'ils passeraient à l'acte un jour.
De lui, on disait qu'il était tantôt blanc, tantôt
noir. Aujourd'hui, pour beaucoup c'est un fantôme gris sans
intérêt. C'est drôle comme les tons de gris semblent déranger
l'homme du commun. Il faut être blanc ou noir, c'est plus commode.
Mais lui n'était ni l'un, ni l'autre. Il était autre part mais
cela échappait aux regards de la majorité des homos sapiens.
Il avait su se protéger.
Grand bien lui ai fait.
D'elle, on disait qu'elle était tantôt sa bonne
conscience, tantôt sa mauvaise conscience. Tantôt sa compagne,
tantôt sa maitresse, au mauvais sans du terme.
Elle n'était rien de tout cela. Elle voulut être
son égérie et son inspiratrice.
Mais leurs fonctions étant devenues trop dévorantes,
elle comprit qu'ils devraient faire un choix drastique s'ils voulaient
ne pas perdre leur âme. C'est ce qu'ils firent en s'éclipsant
par la porte de derrière.
Atelier d'écriture
3 mai 2010
texte 18
A la recherche du bonheur !...
C'est quoi cette histoire de bonheur ? Il paraît
qu'Amédée est en quête du
bonheur ? Ses copains et copines en sont restés baba.
Lui, en quête du bonheur ?
Ils se disent qu'il va avoir du pain sur la planche, lui dont
le credo le
paraître avant l'être. S'occuper de sa carrière
avant de s'occuper de sa
personne. Mais c'est justement parce qu'il veut s'occuper
de lui, leurs avait-il dit, qu'il est décidé à se trouver
l'âme sœur pour vivre dans la campagne verdoyante de son enfance. Il
veut quitter la grande ville, source de tous ses maux, dit-il, et rencontrer
des émotions que seule la nature peut lui apporter.
Il a donc appliqué son plan de bataille et au bout
de quelques semaines, il
s'est trouvé sa Juliette. Présentation a été
faite à son entourage, son cercle d'amis plus exactement, qui lui
souhaita bien du bonheur et plein de bonnes choses. Il était comme
sur un petit nuage. Juliette était enjouée et rieuse.
Toujours de bonne composition et cela semblait plaire à
Amédée. Mais je
remarquais qu'il y avait par moment une certaine crispation
lorsque ses copains devenaient entreprenant devant les comportements plutôt
de Juliette. Sentait-il déjà qu'elle pouvait lui échapper
?
Il y avait quelques mois que je n'avais pas eu de nouvelles
d'Amédée. Et alors que je faisais mon marché en ville
voilà-t-il pas que le rencontre seul, l'air inquiet. Que t'arrive-t-il
mon Amédée, tu fais une drôle de tête ? Ne me dit
pas que cela ne va plus avec Juliette. Il me rassura sur leur relation. Tout
était merveilleux. Il vivait une idylle extraordinaire. Elle était
merveilleuse, attentionnée, drôle mais pour ce qui était
de gérer le quotidien de la maison, c'était une autre histoire.
Mais il me rassura en me disant qu'il avait embauché une personne
pour tous ces travaux de la vie quotidienne pour lesquels il n'avait pas,
lui non plus, une grande affinité. Et comme je lui disais que donc
tout devait aller bien, je vis qu'il restais maussade. Tu ne me dis pas tout,
n'est-ce pas ? Il me fit son cinéma comme il savait si bien le faire
mais devant mon air interrogatif, il se lâcha. Je viens d'être
nommé en Chine par ma société. C'est une bonne nouvelle,
ça ! C'est toi qui le dit, mais moi ça ne m'enchante pas car
je viens d'acquérir une maison en Dordogne où j'avais prévu
de m'installer progressivement. Et dans quelques années quitter mon
travail pour vivre avec Juliette loin des tracas de la ville. Vivre notre
bonheur comme nous l'entendons.
- Et quel est le problème ?
- Et bien Juliette n'est pas très chaude pour aller
en Chine avec moi.
D'ailleurs, elle m'a avoué que même la Dordogne
ne l'emballait pas plus que ça.
- Tu veux me dire que tu découvres une autre Juliette
que celle que
tu nous avais présenté de manière dithyrambique
lors de nos présentations.
- C'est un peu ça, hélas!
Je vis un Amédée tourneboulé.
Il n'était pas dans son assiette et je
dois avouer que je ne l'avais jamais vu ainsi.
Mais j'avais
un doute. Son histoire me paraissait bancale. Je découvris quelques
mois plus tard par une amie commune qu'il avait en réalité
commis l'erreur de se laisser aller à des dérives à
l'encontre de sa bonne et que sa Juliette l'avais très mal pris. Elle
avait sur le champ quitter l'appartement.
Et depuis, il n'avait plus eu de nouvelles malgré ses
supplications et
nombreuses tentatives pour essayer de recoller les morceaux.
Il lui avait promis le grand amour, avec en prime le bonheur et à
la première occasion, il avait sauté sur une paire de seins
aguichants, ce que n'avait pas Juliette.
Après cette rencontre, je n'eus plus de nouvelles d'Amédée
durant quelques
années. Était-il parti en Chine malgré
tout ? S'était-il retiré dans sa maison en Dordogne, vivant
en ermite ? Ou bien avait-il repris un autre travail dans une nouvelle société
?
Alors que je dinais chez des amis et que nous regardions le
journal télévisé, quel ne fut pas ma surprise de le
voir dans un monastère bouddhiste. C'était une reportage sur
la Savoie et ses anciens monastères chrétiens reconvertis en
temple bouddhiste. Il en était le responsable de la communication.
Cela lui allait bien. Je n'en croyais pas mes yeux. Tout d'abord, je n'y
avais pas fais attention et c'est mon ami Alexis qui le reconnu. Il savait
vaguement qu'il avait tout quitté pour changer de vie. Mais, rien
de plus. Où était-il, qu'était-il devenu ? Eh bien voilà,
nous étions maintenant fixés. Amédée était
devenu bouddhiste.
Quelle surprise.
Atelier d'écriture
10 mai 2010
texte 19
Angoisse existentielle.
Il est dix-sept heures pile. C'est l'heure à
laquelle Marcel Dugommier sort pour sa promenade quotidienne. Il regarde
le ciel pour se rassurer qu'une averse ne viendra pas lui gâcher son
plaisir. Sous son chapeau de paille tressée, son visage buriné
est barré par une moustache à la Salvador Dali. Il ne fait
pas son âge. Il y a un côté adolescent dans son physique.
Il marche d'un pas alerte sur le chemin qui serpente dans le vallon menant
au lac. Mais par moment ce pas se fait plus lent et semble se bloquer. Mais
il continue car il doit aller au bout du chemin, devant le lac où
il venait se baigner avec sa mère étant enfant.
Chaque jour c'est la même question lancinante qui envahie
son esprit. Il voudrait bien sortir de l'angoisse qui le taraude
mais rien n'y fait. Il a tenté d'y échapper en se noyant dans
le travail tout d'abord et puis dans les voyages, ensuite dans des stages
de ceci et de cela. Cela est apparu à la mort de sa mère et
n'a fait que s'intensifier d'année en année. Un manque de confiance
en lui s'est développé peu à peu au point de l'empêcher
d'avoir une relation affective avec une femme. Et maintenant avec tout être
humain. Marcel, tu files un mauvais coton, se dit-il.
Peut-être que l'espoir va pointer son nez dans la vie
de Marcel Dugommier.
Enfin, c'est ce qu'il se dit ce matin en se levant, en constatant
un changement dans son regard sur le monde. Comme si dans le ciel bouché
de son horizon, une lueur s'était manifestée. Il avait une
sensation en lui qui lui donnait cette impression. Il respirait mieux qu'à
son habitude. C'était pour lui un signe.
Cela ne s'était jamais produit depuis des années.
Il avait l'impression de se retrouver dans les années de son adolescence
précédent la mort de sa mère. Il se regarda dans la
glace et eut l'impression d'avoir rajeuni. Il haussa les épaules.
Ce ne fut qu'une impression.
Sa promenade quotidienne s'avéra nécessaire
pour son moral. Il sortit avec une drôle de sensation. Après
le petit bois, le paysage s'élargit et soudain le lac apparaît.
Il ralentit son pas. Le banc sur lequel il s'assied habituellement n'est
plus là. Il était en très mauvais état. La mairie
a dû vouloir le remplacer mais n'a pas encore fait le nécessaire.
A moins que ce soit quelqu'un qui soit venu récupérer le bois,
qui sait ? Cela le dérangea quelque peu. C'est alors qu'il eut comme
une illumination intérieure. Il alla s'asseoir en tailleur à
l'emplacement du banc et face au lac, il sentit monter en lui un désir
de tourner la page, de se détacher de ses habitudes et de ses souvenirs.
Il décida à cet instant qu'il allait s'occuper de lui et cesser
de vivre dans le regret d'un temps passé qui n'avait plus raison de
l'empêcher de s'asseoir même s'il n'y avait plus de banc.
Je l'aime bien Marcel, il est souriant et aime discuter de
la pluie et du beau temps. Au travail où je l'ai connu, il est apprécié
de tous. Enfin, je crois. Il y en a bien quelques uns qui ne l'apprécient
pas mais je pense que cela est plutôt de la jalousie. Je n'oublierai
pas le voyage que nous avons fait ensemble en Grèce. C'est une culture
que nous aimons l'un et l'autre et ce fut l'occasion de le voir heureux.
Ce que je crois qu'il est malgré ce que disent certains au travail.
Depuis combien d'années n'est-il pas venu ici, sur
le bord de ce lac, qu'il ne reconnaît pas d'ailleurs, avec les aménagements
qui y ont été réalisés. Il a l'impression d'être
dans un autre pays au bord d'un autre lac. Et pourtant lorsqu'il regarde
au loin, c'est bien toujours le même paysage. C'est pareil et ce n'est
pas pareil. A l'image de sa vie. Les lointains n'ont pas changé mais
son environnement proche a été bouleversé de fond en
comble.
Une sorte de petit pavillon ouvert a été construit
à l'emplacement du banc où il venait s'asseoir. Il pénètre
dessous et machinalement il s'assoit au centre sur une sorte de plot qui
semble marquer un lien mystérieux. Le lien de sa transformation de
l'adolescence à l'adulte.
Atelier d'écriture
17 mai 2010
texte 20
Exercice de poésie
Version 1
Motus et bouche cousue, l'âme du monde.
Le silence de la nuit enveloppe mes fantasmes,
N'attendant rien sur le bord de la mer.
Ici et nulle part, à moins que ce soit de l'autre côté,
Je voudrais bien le savoir, c'est un bon début.
Pan toute! Malheureusement je l'ai cru mon cœur!
Du pays aux odeurs enchanteresses, aux eaux claires,
Mais aussi des amours déçus sous des lumières
divines,
Absolument! Mais le temps m'a joué un vilain tour.
Version 2
Motus et bouche couse, l'âme du monde
Le silence, la nuit, enveloppe ma blonde.
Je n'attends vraiment rien sur le bord de l'onde.
Ici et nulle part ou alors à côté
Je voudrais bien le savoir, pour l'en assurer.
Mais pan toute! Mon cœur est bien désabusé.
Du pays aux odeurs douces, aux eaux claires;
Amours déçus, à contretemps, hors lumières
Le temps m'a joué un bien vilain tour, hier.
Atelier d'écriture
31 mai 2010
texte 21
Souvenirs, souvenirs.
Ce n'était pas la première fois que
Charles André se faisait remarquer par son attitude déterminée.
Il venait tout juste de rentrer dans sa onzième année. Sa mère
en était plutôt fière, mais dans son entourage scolaire,
cela provoquait des remous, voir des animosités car il était
perçu comme un orgueilleux, un m'as-tu-vu pour certains. Cependant,
il avait un petit noyau d'admirateurs et quelque fois une ambiance «
guerre des boutons » n'était pas loin d'émerger. Son
père qui par son travail était souvent absent, suivait cela
de très loin. Trop loin pour s'intéresser à des réactions
de l'entourage qu'il voyait comme l'expression de la jalousie de ses copains
de classe. En aparté, il admettait cependant qu'il pouvait aller loin
si les petites bêtes ne le mangent pas.
C'était l'une de ses expressions favorites qu'il reprenait
en citant son grand-père dont la vie avait été
quelque peu aventurière avant qu'il ne se range sous la couette, aidé
en cela par une aventurière que Tarzan n'aurait pas refusée.
J'étais assez d'accord avec son père, ce qui faisait enrager
sa mère car elle avait en elle une part de scepticisme que son attitude
déterminée agaçait parfois. Elle y voyait un possible
obstacle dans le parcours de sa vie.
En le revoyant dans sa quinzième année, je repensais
alors à cette remarque portée par sa mère
lorsque j'appris de sa bouche l'amertume qui l'avait envahie à la
suite d'une histoire assez banale pour moi mais qui avait pris une importance
démesurée à ses yeux.
J'étais venu assister à un match de volley-ball,
invité par l'une de mes nièces.
Il était le leader de son équipe et ma nièce,
celle de 'équipe adverse. Elle m'avait avoué qu'elle ne se
faisait pas top d'illusions quant à une victoire car elle savait que
l'équipe de Charles André avait une très bonne réputation.
Tout alla très bien durant le premier jeu pour lui et son équipe
et puis soudain, comme un grain de sable venant enrayer la machine, il y
eut un renversement d'avantages. Charles André ne semblait plus maitriser
son jeu. Il commettait faute sur faute.
Que se passait-il ?
Je remarquais alors qu'il semblait comme tétaniser
par la présence de ma nièce.
Et elle sembla en jouer à plaisir à partir de
cet instant. Le grand chef, sur de lui, toujours déterminé,
volontaire, perdit la face devant son équipe. Le grand héros
fut contesté, remis en question. Il ne le supporta pas et fit une
sortie fracassante pour ne pas affronter les quolibets.
Il n'admettait pas que les sentiments viennent interférer
dans son jeu. Ma nièce fut portée en triomphe devant le succès
de son équipe et Charles André m'avoua plus tard son amertume
à voir son équipe le réfuter. Mais ce qui m'étonna
le plus fut son aveuglement à ne pas voir qu'il était tombé
amoureux et que cela l'avait perturbé à en perdre ses moyens.
Surtout les moqueries de certains qui n'étaient pas dupes de ce qui
se passait et qui en profitaient pour lancer quelques piques, histoires de
se venger de l'arrogance que parfois il montrait à travers sa détermination.
Détermination qui apparaissait comme un désir de puissance,
de domination pour quelques uns. Ils le supportaient tout en se disant qu'un
jour ou l'autre la vie lui apprendrait à vivre. Et ce jour là
rectifia le cours de sa vie sous les apparences de Cupidon. Il le comprit
bien plus tard et ne s'en plaignit point. Ma nièce l'y aida quelque
peu et il accepta de regarder la vie avec un autre œil que de celui de l'objectif
à atteindre par quelques moyens que ce soient.
A l'approche de la cinquantaine, Charles André était
devenu un homme tranquille.
A l'exemple de son arrière grand-père, il avait
bourlingué à travers les océans et les déserts,
les grandes métropoles et les montagnes aux sommets enneigés
éternellement. Et puis un jour, ayant décidé de se poser
quelque part, il y retrouva une ancienne connaissance qui l'avait battu lors
d'un fameux match de volley. Avec l'âge il eut la sagesse de reconnaître
ses sentiments, de ne pas les réfuter et de s'en servir pour continuer
à poursuivre sa route, une route plus traditionnelle mais tout aussi
difficile à gérer que les aventures que l'on rencontre à
l'orée des bois ou des mers. Mais il reconnut qu'il était près
à les affronter. Déterminait mais sans orgueil exagéré.
Ma nièce y était pour beaucoup mais il n'en dit jamais rien,
sauf à moi.
|