Serre-moi fort


Je m’autorise ce soir  avant la venue du petit matin de demander à mes parents, la permission de me plonger dans un souvenir d’enfance.
Mais comment faire, quand on n’a pas de parents, du moins plus de parents ?
Comment faire quand on est soit même parent? A qui demander ?
Aurais-je le courage d’outre- passer cette non  permission parentale, fut-elle d’outre-tombe ?
Est-ce bien nécessaire, déraisonné ou  complètement futile ?

Serre moi fort contre toi, parle- moi de rois.
Soudain à mes cotés, ton visage, je te vois.

L’horloge reste insolente, elle avance à grands pas et les portes de mes souvenirs restent closes, comme une maison sans tenancière, sans amours à revendre. .
J’ai trop fumé ce soir, l’orage fait des dégâts et je pleure seul avec ma punition, allongé nu sur mon lit, recroquevillé en forme fœtale.
J’attends souvent cette révolte avec moi-même. Mes pensées se limitent et le jasmin ne fleurit toujours pas.
J’ai cinquante ans bien sonné et le coucou ne résonne pas.
Rien ne se passe, rien ne s’échappe, mon enfance s’emprisonne.

Serre-moi fort contre toi, parle-moi de rois.
Soudain à mes cotés, ton visage, je te vois.
Et les joies exaltantes d’une aube rayonnante,
Forgerons tes désirs, comblerons mes amantes.

La famille est une richesse, dont il est bon de profiter quelquefois.
C’est un danger aussi où l’on peut y perdre sa propre vie.
Etre soi, c’est apprendre à se connaitre sans vouloir s’identifier à l’autre.
Etre soi c’est s’aimer et écouter les cœurs ; tous les cœurs.
Etre soi c’est avancer à son propre rythme et vaincre ses peurs.
J’aime la loyauté et la générosité. J’aime à savoir que demain, je deviendrai un peu plus fort, fatigué certes, mais plus fort c’est sur.

Et les joies exaltantes, d’une aube rayonnante
Forgerons mes désir, comblerons mes amantes

L’amour, toujours et encore l’amour…L’amour c’est un vaisseau  spatiale en forme de cœur… L’amour c’est un navire qui traverse  un océan infini de tendresse  entre Orion et Andromède. L’amour c’est la lune qui réchauffe le soleil. L’amour c’est une Princesse en attente de son Prince…L’amour c’est toi et moi…
Et la vie nous échappe comme une étoile filante…Les étoiles meurent aussi ; je lève la tête vers le ciel, des milliers de constellations ressuscitent en mon âme. Elles me contemplent, elles me fredonnent, elles chantonnent à l’unisson les berceuses de mon enfance. Elles illuminent l’amour originel du paradis terrestre…
« Au commencement il y eut les cieux et la terre… ».
Puis la lumière qui surgit des ténèbres et puis tout le reste… même toi, même moi…
Et les joies exaltantes, d’une aube rayonnante
Forgerons mes désir, comblerons mes amantes
Je t’aimerai d’amour, lumière dans les yeux,
D’amour comme un enfant, souriant, malicieux.

Les souvenirs me hantaient, bien avant l’être que j’étais. Cet être immatériel perdu dans le cosmos, en instance de chair et de sang. Je virevoltais, de-ci de- là, tout joyeux.
En fait je ne sais pas si j’étais joyeux, mais je virevoltais, c’est sûr. Etait-ce dans le cosmos ?
En tout cas j’avais des ailes blanches, blanches comme les neiges éternelles au dessus des nuages, blanches comme les seins de Vénus, blanches comme les dents détartrées de ma mère.
La mémoire à ses effets premiers, puis des effets secondaires quelquefois indésirables.
Il y a la mémoire cellulaire bien avant l’avant, la mémoire digitale avec ses indigestions, la mémoire numérique. Elle, elle énumère sans cesse ; elle énumère sans cesse…

Je t’aimerai d’amour, lumière dans les yeux,
D’amour comme un enfant, souriant, malicieux.

Je m’autorise ce soir avant la venue du petit matin, sans la permission de mes parents, d’enfreindre un souvenir de mon enfance, celui que j’avais peur de vous raconter…écoutez…tendez bien vos oreilles :

« Il était une fois… L’Algérie 1962, j’avais cinq ans, environ, une croisière familiale, sur un gigantesque bateau le cap sur Marseille, nommé « le ville d’Oran ».Il y avait beaucoup de monde, avec des femmes, des hommes, des enfants et beaucoup, beaucoup de grandes valises sur le pont ; lourdes d’objets, de souvenirs et de larmes. »

« Il était une fois quand j’avais cinq ans, environ, une grande déchirure… »

Soudain, la transgression me libère…

Je t’aimerai d’amour, lumière dans les yeux,
D’amour comme un enfant, souriant, malicieux.
Et les joies exaltantes, d’une aube rayonnante
Forgerons mes désirs, comblerons mes amantes.
Serre-moi contre toi, parle-moi de rois,
Soudain à mes cotes, ton visage, je te vois.



Paul Dahan     Novembre 2011