De son enfance difficile en Pologne en passant par son adolescence sous le soleil de Nice, jusqu’à ses exploits d’aviateur en Afrique pendant la Seconde Guerre mondiale… Romain Gary a vécu une vie extraordinaire. Mais cet acharnement à vivre mille vies, à devenir un grand homme et un écrivain célèbre, c’est à Nina, sa mère, qu’il le doit. C’est l’amour fou de cette mère attachante et excentrique qui fera de lui un des romanciers majeurs du XXème siècle, à la vie pleine de rebondissements, de passions et de mystères. Mais cet amour maternel sans bornes sera aussi son fardeau pour la vie…
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à G et à D Charlotte G. et Nemo Schifman (clic pour agrandir)
Compte rendu de Jacqueline
LA PROMESSE DE L'AUBE/Eric Barbier d'après le roman de Romain Gary
Séance du 5 Janvier 2018
-ooOoo-
Romain Gary ( né Roman Kacew ) fait le récit de sa jeunesse, plutôt les relations que sa mère et lui entretiennent. Le roman s'arrête à la mort de sa mère qu'il apprend à son retour de mission, à la fin de la guerre et de la Résistance dans laquelle il s'était engagé.Jacqueline
Le film suit à peu près la narration du livre. Toutefois les premières images présentent "la Día de los Muertos", au Mexique ou dans le Sud Ouest des EU, à laquelle Romain Gary assiste. Il est dans un taxi à côté de sa dernière femme, légataire de son oeuvre. Elle lit le manuscrit de "la Promesse de l'Aube". Cette première scène semble annonciatrice de sa mort par suicide en 1980 qu'il avait annoncée à plusieurs reprises quelques temps auparavant. Par ce préambule le film nous introduit dans le roman qui est autant une affabulation qu'une autobiographie de Romain Gary. Le récit va de sa naissance à Vilnius (Lituanie) à son retour de guerre et retrace les divers lieux où il vécut avec sa mère. Son père est absent du récit.
Le réalisateur respecte le décalage entre le rôle que jouent les personnages, surtout la mère, et ce qu'ils sont réellement, d'où l'humour voire le grotesque des propos qui parcourent le film et l'empèchent de sombrer dans le tragique de l'antisémitisme qui se dévoile et les déboires après les réussites. Par exemple les premiers amours de l'auteur, son apprentissage au tir, avec le compagnon de sa mère, ses vélléités artistiques qui se heurtent aux stéréotypes de la mère, ou encore quand soldat dans l'armée de la FAFL en 1940, dans la région du lac Tchad (RCA ?), envahi par les moustiques, il utilise son pistolet...
"Tu seras un héros, tu seras général, Gabriele D'Annunzio, Ambassadeur de France – tous ces voyous ne savent pas qui tu es !" dit la mère à son fils adolescent.
La mère tient des propos proches de la folie, ses ambitions pour son fils sont démesurées. Ils vont jusqu'au sacrifice de son fils bien-aimé, à la fois pour défendre son appartenance juive, sa mère quand celles-ci sont injuriées par les collégiens polonais, et, aussi devenu adulte, pour défendre l'honneur de la France.
Ambitions démesurées d'une mère omniprésente qu'il doit honorer. Il devient un grand écrivain, malgré des débuts difficiles, peu publié sauf ses premières nouvelles dans "Gringoire" qui, de la droite centriste, va évoluer vers l'idéologie fasciste et que Romain va alors quitter cherchant d'autres éditeurs après 1935. Il respecte aussi les voeux de sa mère en rejoignant l'armée du Général de Gaulle dès 1940. Héros, il est fait compagnon de la Libération et nommé capitaine en mars 1945. Pressé de voir sa mère à la fin de la guerre , il apprend qu'elle est morte depuis trois ans. Le film nous dit qu'elle lui aurait écrit des lettres post-datées, confiées au médecin chargé de les envoyer régulièrement. [ce serait une amie de sa mère qui se serait chargée consciencieusement de la tâche]
En 1950-1954 il rencontre régulièrement Theilhard de Chardin [ce que ne dit pas le film]. Il devient le diplomate et l'écrivain sous divers pseudonymes, l'homme de culture que nous connaissons.
Le groupe était réduit à participer à cette séance et dans l'ensemble il a aimé le film. D'abord l'interprétation de Charlotte Gainsbourg qui incarne admirablement bien la mère, dans ses exagérations et aussi avec finesse. Elle nous a surpris en interprétant une femme vieillissante, alors que nous voyons en elle la jeune femme. Pierre Niney que nous ne connaissions pas interpréte bien aussi le jeune gringalet promis à un avenir brillant et dont la virilité machiste sans faillir, devait se montrer à la hauteur des voeux de la mère. Il jouait très bien l'adolescent et le jeune homme "vampirisé" par celle qu'il aimait autant qu'il pouvait la haïr à certains moments... pourtant il est allé au bout des desseins maternels.
What's the question : Les ambitions des parents dans la réussite de leur progéniture sont pour eux ou leurs enfants. Jusqu'où peuvent-elles être contraignantes et anhiler leur personnalité ou au contraire les pousser à donner le meilleur d'eux-mêmes ?
Bref : le film mérite d'être vu !
Commentaires
Oui j'ai été un peu déçu de ne pas pouvoir suivre les dialogues est ce seulement à cause de mes oreilles ? Comme d'habitude j'aurais préféré que tout soit sous titré.
Je me suis régalé des images pour me créer un scénario personnel. Je ne connais pas assez Romain Gary pour faire des rapprochements et je reste sur l'impression d'être de plus en plus marginal, comme dans la vie courante.
Les acteurs, tous très bons par leur jeu et pas forcément par leur élocution, ils m'ont bien accroché sans jamais m'émouvoir. La qualité des images et des prises de vues semble irréprochable.
Voici une critique qui se rapproche bien de ce que j'ai ressenti :
« La Promesse de l’aube », d’après le roman autobiographique de Romain Gary, semble remplir son contrat par la grande fresque que Éric Barbier nous propose... Un film très narratif, très descriptif dont la deuxième partie est beaucoup plus intéressante que le début un peu fastidieux. Et justement, c’est bien là que le bât blesse, par ce côté presque hollywoodien à vouloir tout englober, tout montrer, tout nous faire comprendre sur le pourquoi du comment de cette relation dévastatrice, entre une mère castratrice au plus haut degré, et un fils soumis et en même temps fasciné par elle... Une impression s’en dégage très vite, celle de plus vouloir nous plonger dans ce qui est à voir, plutôt que dans ce qui est à ressentir, à percevoir et à analyser ! Et pourtant, les deux acteurs Pierre Niney et Charlotte Gainsbourg se démènent vraiment, jusqu’à là aussi presque trop en faire, mais sans délivrer de véritables émotions. Comme si le cinéaste avait privilégié davantage le récit, plutôt que dévoiler la véritable psychologie des personnages... On aurait aimé plus de dépouillement et de force, mais moins de faste et de belles cartes postales. Un resserrement sur cette terrible relation aurait permis d’entrer à fond dans le fonctionnement de ces deux esprits, bien que pas mal de moments nous démontrent la folie qui gagne ce duo, inter-dépendant, antagoniste et pourtant indissociable ! Ici la mante religieuse dévore son fils, le broie, le culpabilise en croyant l’aimer pour en tant que mère, mieux se valoriser et se réaliser, en compensant ainsi ce qu’elle a raté personnellement ! À ce niveau, certaines scènes sont d’une cruauté terrible et le mécanisme est plutôt bien montré dans une deuxième partie, ainsi plus pertinente et nettement plus efficace ! Alors sans démériter pour autant, ce film semble se disperser par tous les bouts, comme s’il voulait ne rien oublier, et être le plus exhaustif possible quitte à perdre en passant ce qui fait l’âme du roman de Romain Gary. Un travail plus personnel, un peu moins scolaire était sans doute préférable mais il n’en reste pas moins que ce récit édifiant pourra plaire dans son déroulement. Une destinée assez terrible dont la fin à elle seule, retranscrite par les mots de l’auteur lui-même en guise de conclusion, nous saisit d’effroi et ceci avec beaucoup de résonance et de portée...
Merci, Marc, à la fois d'avoir enregistré comme d'habitude le compte rendu sur le site mais aussi de nous transmettre une critique très bien stylée. D'où la tires-tu ?
Je ne suis pas entièrement d'accord avec son auteur, car je crois que la volonté du réalisateur était de passer brièvement sur les premières années de Romain Gary pour mieux décrire une mère castratrice à un âge où un enfant doit vivre des relations extérieures à celles exclusives mère-enfant. Elle assigne à son enfant une position d'homme prématurément, voire même le modèle pour en faire son homme idéal. Je ne perçois pas du tout une tendance" hollywoodienne" comme lui reprochent "Positif" et "les Inrockuptibles" également.
Jacqueline
La critique vient de Allociné sur InternetUn traumatisme qui n’a pas été abordé dans le film et dans notre “débat”: l’incendie de sa maison et la mort de sa famille. Je crois avoir lu cela dans un de ses livres. Alain
Je ne me souviens pas avoir lu ce fait mais je n'ai lu que deux autres livres sous le nom de Gary dont l'un je ne me souviens plus bien duquel "La danse de Gengis Cohn" ou dans "L' éducation européenne" dans lequel caché dans un buisson, il décrit un allemand qu'il aperçoit et il pense avec humour que l'Allemand déteste les Juifs mais qu'il le veuille ou non, il est de toute manière enjuivé par la longue histoire et les influences que les deux peuples ont etc..." et l'autre que j'ai lu et dont je me souviens un peu "Au-delà de cette limite votre billet n'est plus valable" sur la vieillesse et qui expliquerait certainement son suicide.
Mais ce que tu soulignes ouvre une énigme : Gary, son pseudonyme est un mot russe qu'on peut traduire en français par le verbe à l'impératif, à la 2ème pers. du sing. par "brûle" et Ajar, nom d'actrice de sa mère :"braise" traduction que j'ai trouvé sur internet.
Quel personnage on n' a pas fini de se poser des questions à son égard. ! Jacqueline