les textes de Marc Une histoire d’amour


 : Jose et Zizi
Dis Sylvaine ! Comment se sont connus Papa et Maman ?
Hou là ! C’est bien compliqué ; mieux vaut leur demander directement.
Je crois savoir que Papa Romain avait bien envie d’avoir des enfants bruns aux yeux noirs et quand il a rencontré Maman Zizi, il a tout de suite trouvé son compte bien qu’elle ait une belle chevelure rousse et frisée et des yeux en amande. Ils se sont mariés sans doute par intérêt car Maman n’était pas, semble t il, très amoureuse. Tout marchait bien cependant et ils ont eu des enfants : nous deux, toi et moi. Romain s’est lancé dans son entreprise et Maman a poursuivi sa formation.
Il y a eu des vagues dans le couple car Maman a vécu très tôt et pendant une longue période une belle histoire d’amour.
 
Je m’appelle José et j’ai connu Zizi alors qu’elle voulait démarrer, en ville, son activité de gymnastique posturale à base d’étirements. Elle disait que cette méthode était la base du yoga, que c’était essentiel pour avoir une bonne présentation, une attitude juste et prévenir tous les ennuis physiques. En fait, si elle était efficace pour réduire les raideurs, la pratique était austère, décousue et demandait beaucoup d’explications au détriment de l’harmonie de la séance et la concentration sur le ressenti.
Elle était belle Zizi avec ses cheveux de feu et sa démarche féline. Une voix haut placée lui donnait un charme particulier. Je lui ai proposé d’utiliser la salle que j’avais aménagée pour les pratiques que je dirigeais moi-même.
Dans un premier temps j’ai voulu suivre ses cours pour connaitre ses secrets mais j’ai été très distrait par les formes de son bassin.
Sans doute l’attrait était il partagé car nous nous sommes retrouvés rapidement dans une relation amoureuse en partageant des goûts communs physiques, émotionnels et spirituels. Résidant à distance, on se voyait une fois par semaine et nous échangions surtout par téléphone.
 
José et Zizi se donnaient rendez vous, chez elle, une maison en pleine campagne non loin de la montagne de Lure.
J’étais leur seul voisin et j’habitais à trois cent mètres à vol d’oiseau,  sur l’autre versant du vallon. Mes fenêtres avaient vue sur leur jardin. Les amoureux pouvaient se croire seuls au monde mais parfois, accoudé à la balustrade de la fenêtre du premier étage, je les observais avec mes jumelles dans leurs élans passionnés.
Romain, se doutant de quelque chose, m’avait demandé de lui dire si je voyais ce qui se passait chez lui. Un jour où j’ai vu le véhicule de José, j’ai signalé qu’il avait de la visite. Il a laissé son chantier un moment pour arriver chez lui à l’improviste. Il n’y a pas eu d’éclat mais à partir de ce jour Zizi s’est résignée à mettre fin à leur histoire d’amour et  je n’ai plus vu de voiture rouge se garer le long de la maison.
Les arbres, qu’ils ont plantés entre leurs ébats, ont poussé et me cachent la vue sur le jardin d’en face. Inutilement car maintenant, les temps ont changé même avec mes jumelles, je ne les verrai plus évoluer dans une sorte de bonheur que j'avais plaisir à imaginer.
 
En fait, ça a été très dur ! J’ai tout fait, moi Zizi, pour sauver mon couple. Je ne tenais pas à ce que mes enfants soient tiraillés entre leurs parents. Oui j’ai demandé à José de cesser toute relation avec moi car notre amour avait pris trop de place et Romain n’était pas bien du tout.
Alors, un soir, en rentrant d’une journée de ski sur les pistes de la montagne de Lure voisine, nous nous sommes dit adieu d’un commun accord. J’en ai été malade, j’ai fait une grosse dépression.
José, lui, tout en étant d’accord sur le principe, n’y croyait pas, il voulait faire le point et il a bien tenté de me rappeler au téléphone une fois ou deux, les premières années mais j’ai tenu bon et je lui ai indiqué fermement que je prendrai toute tentative de contact pour du harcèlement.
Pour mon équilibre, pour sauver ce qui pouvait subsister avec Romain, pour garder au fond de moi tout ce que nous avons vécu de bon ensemble avec José, je m’interdisais, sans succès parfois, de penser à lui.