Les années 1927 à 1935,
d’après la correspondance entre Jean
Bitterlin et Jean Lamy
ayant trait surtout sur leur divergence
en matière de politique
4 avril 1927 |
de Jean B à Jean
L |
«Les
voyageurs (il s’agit entre autres de Philippe, envoyé au Corso au moment
de la naissance de Jean-Pierre …) sont arrivés vendredi très peu
fatigués avec un petit quart d’heure de retard. Nous ne les attendions guère,
car les journaux nous avaient annoncé une tempête en Méditerranée. Philippe
a une mine superbe ; il a un peu grandi ; son séjour au Corso, dont il
garde d’ailleurs un excellent souvenir lui a fait du bien. Je te remercie
bien de t’être embarrassé de lui, car il souvent agaçant par ses cris et
le bruit qu’il fait. Remercie aussi Marinette de l’avoir si bien soigné.
Avec un léger accent, qu’il a pris là-bas, il nous raconte tout ce qu’il
faisait, les farces qu’il s’amusait avec toi ou avec son grand-père, le
travail que tu lui donnais, etc … En arrivant ici, il a eu la joie de
trouver le petit frère que nous lui avions promis, s’il le demandait au
Bon Dieu dans ses prières. C’était l’étonnement de tous, car on l’attendait
15 jours plus tard. Mais Marguerite avait eu la bonne idée de faire un peu
de machine à coudre la veille et, ma foi, elle a été débarrassée sans inconvénient
pour le bébé qui pèse encore un peu plus que la normale (3kg400). Ton filleul,
qui s’appelle Jean-Pierre, ou Pierre tout court, a été ondoyé hier. M.
le Curé, malgré son extrême faiblesse, a tenu à venir lui-même. Antoinette
tenait l’enfant dans ses bras, et Raymond te remplaçait dignement. Ensuite
le champagne a été versé et nous avons trinqué à la santé du petit chrétien,
de ses parents, de ses parrain et marraine, et avons souhaité à Denise
un petit gars comme lui en octobre. Le baptême sera fait à l’église aussitôt
ton arrivée, c’est-à-dire le 4 juillet. Maman nous a remis la jolie couverture
qu’a confectionnée Marinette et qui, pour le moment, reste sur son berceau
alsacien ; félicite-la pour le beau travail qu’elle a fait et que tout
le monde admire et remercie-la de notre part à tous deux ». |
1er avril |
de Jean L à Jean
B |
«J’ai
été très sensible au premier baiser par télégramme de mon filleul. Je lui
dirai plus tard, car peut-être maintenant ne comprendrait-il pas toute la
joie que nous a apportée cette manifestation de sa présence. Joie s’unissant
à celle de tous à St-Maur, et particulièrement à la vôtre, heureux parents,
qui voyez tous vos vœux comblés. Donc tout est pour le mieux dans le meilleur
des mondes en ce début de printemps, et la tante et l’oncle du Corso ont
une raison de plus de se réjouir d’avoir un neveu et un filleul, c’est-à-dire
un futur voyageur qui viendra comme celui de cette année apporter une fraiche
gaité dans la grande maison désespérément vide ! Nous avons Jeannine il
est vrait, mais elle ne remplace pas pour moi les jeux et les rires de ton
fils. Il a du vous conter toutes les farces qu’il me faisait et que je
provoquais un peu trop peut-être à des moments où les sages enseignements
de ses parents lui commandaient de se tenir tranquille. J’espère que, rentré
dans le giron paternel, il perdra vite ces velléités d’émancipation. Il
vous revient d’ailleurs avec un bagage de connaissances nouvelles et utiles
à des degrés divers. Il vous suffira, à l’occasion, de faire quelques émondages
dans son vocabulaire qui a pu s’enrichir à la fréquentation des enfants
de la ferme !» Commentaires sur
la condamnation de l’Action Française ; une question concernant la possibilité
d’inconvénients des cures d’Adrénaline |
12 avril |
de Jean B à Jean
L |
« l’adrénaline
est un excellent médicament pour relever une tension basse ; mais il faut
l’employer pendant très longtemps. Je te recommande donc d’en prendre
pendant 15 jours chaque mois, 2 fois par jour, 10 gouttes, autant que
possible ½ heure avant le repas ; et lorsque tu viendras à St-Maur, je
mesurerai ta tension artérielle …Ton filleul boit bien et nous empêche
un peu de dormir ; mais nous arriverons bien à le dresser comme les autres».Suivent impressions et questions après la mise
àl’index de l’Action Française «pour défendre le capital et le
bourgeois, pour sauver l’ordre, il n’y a que les Jeunesses Patriotes et
l’Action Française ; elle doit donc rester ce qu’elle est et telle qu’elle
est». serein en attendant que le conflit s’apaise. |
20 avril |
de Jean L à Jean
B |
Surpris de la
position exprimée antipapale « le pape doit juger sur un plan supérieur
… L’action catholique doit primer l’action politique … Charles Maurras,
grand dispensateur d’anathèmes» ; fait référence à un article de Maritain
sur l’obéissance au pape. « La coqueluche sévit toujours avec beaucoup d’intensité.
Philippe peut se vanter d’y avoir échappé, car les quintes vont bon train ;
dans le langage des gens d’ici, il s’agit de « craintes » … Quant à Jeannine,
elle va mieux et n’aura bientôt en fait ce « craintes » que celle de sa
marraine, ce qui est le commencement de la sagesse. |
25 décembre |
de Jean B à Jean
L |
«Noël !la
messe de minuit, le réveillon chez mes parents, les souliers dans la cheminée
et la joie naïve des enfants qui y trouvent des jouets de toute sorte ;
tout le monde est en fête et nous étions tous de cœur avec vous deux au
déjeuner de famille qui eut lieu chez tes parents et auquel vous manquiez
… Cette journée de noël n’a pas été agrémenté du temps classique de la saison :
il y avait 12° au-dessus de 0 et il a plu toute la journée … Dimanche
prochain, ce sera une nouvelle réunion chez Bonne-Maman, où on rejouera la
pièce que nous avons jouée à Nangis ; je prendrai ton rôle, sans oser
espérer imiter ton jeu, et Michel fera le garçon de café». Ne lit plus l’Action Française en attendant
de se forger une conscience ; a pris un abonnement de 3 mois au Figaro qui
contient de si courageux articles de Coty ; se charge de commander un meuble
pour le taxiphote par l’intermédiaire de Grieshaber ; apprécie le tabac
dans la pipe et souhaite en avoir en juillet. |
14 janvier 1928
|
de Jean B à Jean
L |
« Inutile
de m’envoyer Primauté du spirituel (de Jacques Maritain) ; je l’ai acheté
dès qu’il a paru, en édition numérotée du Roseau d’Or, comme j’aime à posséder
les livres. Je l’ai lu très attentivement, dans l’espoir d’être convaincu
de mon erreur ; mais, à la fin, jen’étais pas le moins du monde troublé
et je ne voyais pas l’obligation de changer d’attitude. Jacques Maritain
est un homme supérieur ; ses accents pathétiques d’obéissance au pape sont
touchants, mais ils sont d’un juif converti, comme tu dois le savoir,
un peu trop nouveau venu dans notre religion ; et il ne voit pas que certaines
résistances respectueuses peuvent amener un changement dans la politique
pontificale plus favorable aux intérêts du pays sans nuire à ceux de
l’Eglise. C’est l’avenir que j’entrevois. Malheureusement le changement
viendra trop tard car les élections sont terminées avec un joli succès
de la gauche socialo-communiste … car le triple but (de Briand) est de
diviser les catholiques, de nuire à l’Eglise et de supprimer l’Action Française
(en vue probablement des élections de 1928) … Les numéros trois et quatre
de nos enfants, c’est-à-dire Odile et ton filleul ont été très enrhumés,
comme tu as du l’apprendre ; il n’y paraît plus rien et la température redevenue
clémente permet qu’on les sorte régulièrement. La fameuse pièce de Tristan
Bernard a eu plein succès chez Bonne Maman, si bien qu’on doit la rejouer
demain ici, devant ma famille et les Grenier. Tous ces détails doivent
t’être donnés plus amplement par Maman et surtout par Suzanne qui se fait
beaucoup à l’idée de se marier ; aussi espérons-nous que cette année nous
donnera un beau-frère qui fasse son bonheur ».. |
24 janvier |
de Jean L à Jean
B |
déçu de la réaction
au livre de Jacques Maritain « que je tiens pour admirable de
clarté et de profondeur … Qu’est-ce d’abord que votre résistance respectueuse ? » ;
à propos d’une répercussion possible de la condamnation de l’Af sur les
élections « il est probable que les électeurs royalistes détourneront
des listes modérées soit par abstention soit en votant pour des candidats
sans chances quelques milliers de voix ». |
6 février |
de Jean B à Jean |
revient sur son
impression du livre de Jacques Maritain, après avoir lu Pourquoi Rome a
parlé, du même auteur ; regrette qu’on n’y voit pas le début de la crise.
Toujours en sympathie avec l’AF « Mais Maritain a peut-être raison
de dire que l’école d’AF et son esprit peuvent être dangereux et devraient
disparaître … L’idéal serait de rester au-dessus de toutes ces batailles
et de toutes ces discussions. Au Corso, dans le calme et l’isolement, tu
as déjà cet esprit. Pierre, dans son bled, a du en éprouver le bienfait
encore plus que toi. Je vous envie tous deux ; car la solitude porte à de
saines réflexions. Mais ici la lecture des journaux, le bruit, la vie mouvementée,
les discussions de chaque jour avec l’un ou l’autre nous poussent tout
de même à faire un peu de politique, même lorsqu’on voudrait l’éviter. Et
quand, à l’approche des élections, on voit cette cuisine qui se prépare
pour le partage de l’assiette au beurre, sans aucun souci des intérêts de
la France, il est bien difficile de retenir ce cri libérateur : A bas la
République ! et Vive le roi ! » |
28 mai |
de Jean L à Marguerite |
S’incline devant
les arguments qui empêchent de reporter la date de la réunion de famille
prévue pour le 3 juillet « nous arriverons le ou le 3 au matin
très souriants et aussi frais que nous aura laissé le charbon de la Cie
d’Orléans … Mes beaux-parents comprendront ; ils viennent demain visiter
une propriété assez proche d’ici où André et Malou pourraient s’installer » ;
a lu avec grand plaisir et intérêt l’éloquent plaidoyer de Jean pour l’AF
et envoie un article de Jacques Maritain ; a envoyé aussi, en retour, des
souliers du 22 pour Odile ; apportera une timbale à son filleul Jean-Pierre. |
7 février 1929 |
de Jean B à Jean
L |
Où il est question de Pierre qui rompt les relations avec une certaine Odette,
« jeune fille très sympathique mais tellement influencée par
ses parents qui sacrifient le bonheur de deux jeunes gens pour qu’il ne
soit pas dit que leur fille épouse un militaire ou un ingénieur qui n’a
pas une situation de plusieurs centaines de mille francs par an. Comme si
un garçon de 27 ans, même sortant de l’X, pouvait gagner cela à l’heure
actuelle ! Ou alors, qui sait si M. B…, voyant sa situation à l’usine de
Conflandey supprimée, ne se voit pas obligé de réduire la dot annoncée de
sa fille, et ne voulant pas l’avouer à ton père, préfère trouver un autre
mari à Odette plutôt que de subir cette humiliation !... La seule crainte
que l’on ait tous, c’est qu’ayant besoin d’affection et de mariage, Pierre
ne s’amourache d’une jeune fille quelconque dont la vie et les sentiments
ne concordent pas avec les nôtres … Y a-t-il du regret à avoir de cette
rupture ? De l’avis général, non ! Et cependant c’eût été un si gentil couple !
Tout concordait en principe : fortune, sentiments moraux et chrétiens.
Restant dans l’armée ou trouvant « une petite pantoufle » comme il dit,
Pierre aurait pu vivre avec sa femme sans se faire de bile ». |
24 juin 1930 |
de Jean B à Jean
L |
Regret qu’un accident
(AVC ?) de M. Bouchet empêche d’être présent à la réunion familiale ; conseille
de venir consulter à Paris ; rappelle la mort de sa grand-mère et de Bonne-Maman ;
sa mère vient de se casser la jambe ; elle est dans une gouttière pour
au moins trois mois. |
1er
janvier 1931 |
de Jean B à Jean
L |
Vœux pour que
des piqures répétées chaque jour évitent de cruelles souffrances au malade.
«A toi, je demande de prier pour mes enfants, dont le dernier
(Annie) a passé une bien mauvaise année (coqueluche
à 6 mois), et pour celui qui va venir, qua ma pauvre Marguerite
accepte encore sans joie, et que je voudrais voir pareil aux autres ». |
6 février |
de Jean B à Jean
L |
Condoléances pour
le décès de M. Bouchet : « le triste événement est donc arrivé
à l’époque prévue sans qu’aucune médication ait pu arrrêter le mal terrible
qui rongeait votre cher disparu ». |
24 février |
de Jean L à Jean
B |
Merci pour les
témoignages de sympathie reçus à la suite de « la pieuse fin de « papa Georges ».
« J’ai admiré dans un lot de photos envoyées par Pierre, le
tableau de la crèche de Noël. Le petit ange, mon filleul, semble s’acquitter
de son rôle avec autant de sérieux et de conscience que lorsqu’il figurait
le petit poulain cet été à Nangis ». |
25 avril |
de Jean B à Jean
L |
Envoi des photos
de Philippe ; Jean-Pierre au Corso ; « sa maman termine correctement
sa grossesse (Lisette), mais ne sort plus que dans le
jardin ». |
16 mai |
de Jean B à Jean
L |
Se réjouit que
Doumer succède à Doumergue et de la réaction populaire et générale contre
Briand. « Dis à Jean-Pierre d’être bien sage … le petit frère
n’est pas encore là ; mais, note bien, il ne devait pas être là avant le
15 mai ; cependant c’est toujours trop long ! » |
11 janvier 1933 |
de Jean B à Jean
L |
Félicitations
pour la nomination à la Légion d’Honneur « Tu as devancé l’appel,
tu es revenu mutilé après avoir subi les souffrances et les responsabilités
de ton grade, la gloire de Marcel doit retomber entièrement sur toi, si
l’honneur en revient à tes chers parents. … Malgré une épidémie de grippe
qui sévit actuellement, tous se portent assez bien ; les enfants travaillent
en classe comme il faut, ils donnent satisfaction à leurs parents, du plus
petit au plus grand. Que cela continue ainsi et que les malades rapportent
au foyer suffisamment pour les nourrir, les élever et les instruire, peu
importe alors le régime absurde sous lequel nous vivons ! » |
9 mai |
de Jean B à Jean
L |
Envoi d’un exemplaire
de la Revue hebdomadaire avec la lettre du duc de Guise à LePrévost de Launay.
« C’est une grande joie pour nous, royalistes, de constater qu’enfin les
esprits s’éveillent, réfléchissent et comprennent qu’il est impossible d’arriver
à quoi que ce soit avec le régime actuel … que sele la planche de salut
est la monarchie traditionnelle et héréditaire. D’autre part, c’est une
autre satisfaction de voir que l’AF avait raison de mettre en garde depuis
plusieurs années le public contre les tendances pacifistes et internationales
de ceertains groupements catholiques. En constatant ce revirement et cette
réaction générale, on peut ne pas désespérer de l’avenir de notre pays.
J’espère que Jean-Pierre dont vous vous occupez avec tant de soins, Marinette
et toi, ne vous donne pas trop de soucis, qu’il travaille bien avec sa
tante et qu’il est en bonne santé ». détails sur l’état de santé critique
de l’oncle Paul |
16 mai |
de Jean L à Jean
B |
Réagit aux articles
de la Revue hebdomadaire et à la récente lettre du duc de Guise qui préconise
le retour à la monarchie, sans le convaincre. « Jean-Pierre m’accompagne
dans mes tournées ; il est d’une sagesse exemplaire et ne quitte la maison
qu’avec l’autorisation de sa tante, quand ses devoirs sont terminés. Comme
il aime le commerce des petites gens, c’est en général pour aller retrouver
le jardinier ou le forgeron qu’il accable de questions ! » ; décès
d’oncle Paul |
30 décembre |
de Jean B à Jean
L |
Merci pour les
sincères marques de sympathie à la suite du décès de sa mère « Maman est
tombée malade à la veille du retour de Rome de mon père : obstruction intestinale,
suivie d’une très forte entérite que son cœur ne pouvait supporter ; une
syncope dimanche dernier nous a montré qu’il serait difficile de la remettre
sur pieds et, en effet, depuis ce jour jusqu’à mardi soir elle s’est éteinte
tout doucement, sentant elle-même son cœur faiblir et acceptant avec bonheur
l’extrême onction |
15 mars 1935 |
de Jean B à Jean
L |
Problème économique
en Algérie ; polémiques entre AF et Croix de Feu ; guerilla entre AF et
le clergé, mais défend l’autorité spirituelle du pape ; « j’aspire à voir
supprimer l’AF et sa ligue, mais, à mon avis, seul le roi de France pourra
le faire et s’y emploiera aussitôt revenu » un séjour aux sports d’hiver
pour couper agréablement le trimestre un peu long de Philippe
qui fait tout ce qu’il peut pour réussir son baccalauréat afin de réaliser
les vastes projets qu’il entreprend pour les vacances et dont l’un consisterait
à aller au Corso. Son avenir paraît se dessiner vers la médecine navale,
carrière que j’approuve pour lui de préférence à la mienne mais à laquelle
sa mère ne se fait pas encore … Quant à Raymond, il est trop heureux pour
qu’on le plaigne. Sa femme surtout aurait besoin de réconfort d’autant plus
que son séjour à Luchon lui a donné une nouvelle poussée d’eczéma ». |
26 mars |
de Jean B à Jean
L |
Conseils et indications
pour placer de l’argent en Suisse. Jean Serrurier s’est cassé la jambe au
ski. « cela calmera peut-être son ardeur qu’il croit encore
juvénile (et nous avons 40 ans !) et l’incitera dorénavant à consacrer ses
loisirs à sa femme ». |
12 avril |
de Jean L à Jean
B |
|
31 janvier , |
de Jean L à Jean
B |
Félicitation pour
la Légion d’honneur, bien méritée, après Charles
et lui. En Algérie la misère commence à se faire sentir, sans lois d’assistance |
16 octobre |
de Geneviève à
Marinette |
reprise des classes :
Odile en 3ème, Geneviève en philo ; les
« petites » ont monté d’une classe, Mme Nicolas espérait après Lisette avoir
Thérèse qui est au Corso avec Christiane ; fait le catéchisme le lundi
et le jeudi ; Jeannette Bouquant recalée à l’oral du bac, examen d’anatomie
pour Philippe |
16 octobre |
à Marinette |
« J’ai
constaté sur la lettre de Thérèse ses progrès en écriture et je te félicite
en te remerciant des résultats obtenus en peu de temps … Pour moi je suis
si occupée que ma petite chérie ne me manque pas trop mais je pense souvent
à elle et les petites sœurs aussi. J’ai fait teindre pour Annie et Lisetter
des manteaux qui venaient d’Odile et Chantal en bleu marine et je vais leur
en faire des gris clair dans le ton de la robe à carreaux et elles garderont
le petit chapeau assorti … Je seconde beaucoup Maman pour la Ligue surtout
à cette époque de la rentrée … J’ai poussé des soupirs de soulagement en
voyant la maison reprendre un programme régulier. » Examen d’anatomie
pour Philippe qui a bien travaillé « ce serait dommage qu’il recommence
une année. On ne parle plus de ses désirs de marine, c’est entendu qu’il
reste avec nous de bonne volonté et je constate qu’il fait des efforts
pour vivre vraiment la vie de famille et comprendre les devoirs sur lesquels
je l’ai éclairé pendant nos conversations plus intimes du mois de septembre ».
Il doit écrire à Paul Marty ( ?) pour le remercier d’avoir accompagné Geneviève
et l’inviter à venir |
27 novembre |
à Marinette |
demande des nouvelles
d’un paquet contenant des vêtements pour Thérèse. « Elle me manque
bien de temps en temps, ma petite chérie, et je voudrais voir son clair
sourire mais mes nombreuses occupations me font apprécier le soulagement
des soins et attentions dont tu me décharges auprès d’elle. La dernière
lettre qu’elle m’a écrite m’a montré ses progrès : tu peux être satisfaite
de ton élève. Ses sœurs Annie et Lisette s’entendent toujours à merveille.
Je leur ai fait commencer le piano ; elles le font avec plaisir et bonne
volonté. Le programme de la maison bien réglé me donne assez de facilité
pour me donner extérieurement à l’activité de la Ligue et l’organisation
de la vente de charité paroissiale. Cela m’intéresse et occupe de saine
façon mon esprit … Je suis obligée de voir beaucoup de monde, d’accueillir
et de stimuler, de susciter les bonnes volontés … C’est un rôle nouveau
que je suis amenée à jouer dans la société qui m’entoure ». Philippe
déçu de son échec « c’était peut-être un bien pour lui »
recommence son année, plus intéressé par son travail et la médecine. Les
Watelet achète Broué et demande des mandarines pour Noël. |
3 janvier 1939 |
de Geneviève à
Marinette |
vœux ; Philippe
revenu du ski ; fiançailles de Michel ; Maman très occupée par la vente
de charité ; Suzanne s’installe à Paris, Denis a de l’eczéma, François pas
commode ; Micou gâté à Noël, joue avec ses 2 trains + un petit mot de Lisette
à Thérèse : a fait des glissades au bois et vu Blanche Neige |
u |
à Jean |
Hésitation au
sujet du retour de Thérèse « combattue par le grand désir de
la revoir et l’idée qu’elle est bien parmi vous pour finir son année scolaire
… Si tu la ramènes je serai contente et j’accepte que vous la gardiez jusqu’en
juillet mais elle ne retournera pas ensuite : elle donnera sa place à d’autres
(Aleth ?) ». Mariage de Michel 10-20 mars « il a été long
à se décider : la perspective d’un changement à sa petite vie, l’inconnu
l’effrayaient ; nous pouvons pensé qu’il a pesé le pour et le contre et
ne s’engage pas à la légère … Mes grands se réjouissent de pouvoir danser
à la réception. Philippe n’en a pas été privé cet hiver, nanti d’un smoking
neuf, il a déjà été à 3 bals ; Geneviève voudrait bien en faire autant,
mais elle est raisonnable ». Jean Morvan en Angleterre pour une exposition
qui se termine le 5 mars. Vente de charité les 16, 18 et 19 février |
8 mai |
à Jean |
Réunion des familles
Blanc et Roche en vue d’une présentation des jeunes gens (Henri ? Jean ?
Mimi ?). Renonce à des vacances à l’hôtel à Noirmoutierrs et envisage une
villa à Villers pour la proximité de Paris. Bac philo de Geneviève le 15
juin. Visionnement des films de voyage de Michel |
24 mai |
à Jean |
Décision prise
pour Villers (la Brise ?) « 9 chambres avec eau courante, salle
de bains, téléphone, garage, gaz, électricité, un peu loin du centre pour
les provisions, mais j’aurai heureusement la voiture ou une bicyclette ».
Séjour à Nangis , temps superbe « Je fais de mon mieux pour
organiser le service et j’espère que Maman ne se trouvera pas fatiguée me
laissant la surveillance complète … Je me réjouis de voir diminuer le nombre
de jours qui me séparent encore de ma petite Thérèse ; comme nous allons
la trouver changer ! » |
12 juin |
à Marinette |
Préparatifs des
vacances. « J’ai bien à faire avec toutes ces filles, les grandes surtout,
il y a bien des robes à faire. Pour les petites, avec des costumes de bain,
chandails et shorts ! (s’il vous plait), elles sont servies et contentes.
Je les mettrai cette année tout en bleu marine et blanc, car je ne veux
pas de couleur vive ». Proximité des Féret à Villers. Séjour à Ste Odile
du 6 au 18 juillet avec les aînés. Philippe passe ses examens. Jean-Pierre
en camp scout du 16 juillet au 5 août dans les Ardennes. Hésitation d’André
Bouchet à venir en France. Mme Bouchet en est contrariée. |
22 juin, de Malbuisson |
à Jean |
profite d’un court
séjour dans le Jura avec ses parents, Suzanne, François et Denis, en laissant la direction de la maison à Geneviève qui
attend anxieusement les résultats du bac. Est passée par Dijon voir les
Dutronc. Monique passe le bac. Emmanuel, filleul de Jean,
grand et maigre, invité à Villers ; compte emmener Séraphine
« les cuisinières sont difficiles à trouver » |
11 septembre
de Bourguignon |
à Marinette |
« les
événements ont pris la tournure tant redoutée et nous voici vivant de nouveau
des jours angoissés et malheureux … les nerfs se font aux sirènes maintenant
mais jusqu’ici pas de dégâts ; gare quand il y en aura ». Pierre à Paris,
venu samedi avec Philippe. Jean Serrurier, venu de Dijon « nous
avons avec Suzanne profité de sa voiture pour faire un petit tour chez
nous prendre des affaires d’hiver ! et visiter un peu la famille restée
à St Maur : Corbery, Bitterlin, Deplechin … Le souci actuel de toutes les
mères qui mettent leurs enfants à l’abri, ce sont les études … Comme on
ne sait combien de temps il faut durer ici, on s’organise pour l’hiver :
on rentre les pommes de terre, ainsi que les haricots, du bois, les fruits. »
Philippe prépare son examen pour octobre à St Maur ; en service à l’hôpital
de Crétail ;ses amis Chevalier et Robert partent cette semaine à l’armée |
23 septembre |
à Marinette |
la situation actuelle
menace de durer ici. Recherche d’une institutrice à demeure. Geneviève apprend
à conduire ; elle pourra aussi servir de répétitrice ; cours Hattmer pour
Jean-Pierre ? Odile pensionnaire à Sucy ? Elle garde souvent Denis ou François,
fait les courses à Nangis avec Chantal. Raymond à Vernon ; Denise reste
à Morgat à proximité de sa famille, les enfants en classe à Crozon. Gr-père
au Corso comme d’habitude ? |
10 octobre |
à Jean |
Question de l’orientation
de Geneviève, attirée plutôt par les sciences, physique ou chimie, en commençant
par le PCB ? attendre un an vue la désorganisation générale ? va chaque
jour à Nangis à bicyclette. Apprend à conduire à Geneviève sur la Juvaquatre.
Profite de la voiture pour aller à St Maur le lundi pour garder le contact
avec les amies et les œuvres. Geneviève fait travailler avec autorité les
petites et même Jean-Pierre. Problème avec les locataires ( ?) : pas de
chauffage individuel. Philippe fait un remplacement d’externe à St Antoine.
Demande 20 kg de lentilles |
7 novembre |
à Jean |
Geneviève a intégré
l’Ecole d’Enseignement Technique Féminin (116 av d’Orléans, Paris) en vue
d’obtenir un diplôme de chimiste en deux ans . Décision prise après avoir
consulté plusieurs personnes dont un secrétaire de la Fédération des Familles
nombreuses que Jean avait connu. « C’est un peu dur
de reprendre la chaîne de 8 h ½ du matin à 5 h du soir, avec un trajet d’une
bonne heure … Elle a donc repris sa place dur Pasteur et viendra comme
Odile le samedi soir et passer le dimanche ici. L’institutrice est gentille
et s’occupe bien des petits mais elle ne peut pas tout faire et je dois
l’aider surtout pour Jean-Pierre, un peu flâneur … Le froid a sévi et nous a fait « prouver l’efficacité» des divers
chauffages ; le calorifère chauffe très bien la salle à manger et le salon ;
la température est suffisante dans les chambres pour y dormir. Promenade
avec « ces messieurs les mobilisés, Jean-Florent, Pierre (en tenue !) Raymond,
Michel. Marc Watelet à Paris, Antoinette rue Pasteur, André à Paris, Marie
à Paramé. |