Le sifflet.
Offrir un sifflet est un cadeau très utile à faire. Bien
sûr il faut savoir l'oublier au fond de son sac ; l'utiliser inopinément
me paraît une erreur comme pour un berger de crier "au loup !" à toute fin
de se désennuyer.
Et sur mon bureau, devant mon nez, insolite, accroché avec une belle cordelette
rouge, il en traîne un exemplaire oublié par les enfants.
Vous avez en mémoire l'histoire du "Titanic" , ce "fétu de paille" de 271
mètres de long et de 60000 tonneaux qui a rencontré dans la nuit du 14 avril
1912, alors qu'on faisait la fête sur le bateau, au Sud de Terre Neuve, un
iceberg, un glaçon, plus exactement une montagne de glace, qui bien malencontreusement
ce soir là, dérivait solitaire sur une mer d'huile.
Dans le film, qui a fait le succès de l'année 99, l'héroïne s'est hissée
précairement sur un radeau de fortune, un meuble incapable de recueillir
deux personnes. Elle venait de voir couler son amoureux d'un jour qui s'était
accroché quelques instants avant de perdre connaissance, transi de froid.
Au milieu des cadavres, flottants grâce à leur gilet de sauvetage, elle était
sur le point de mourir à son tour.
Un canot de sauvetage en quête de survivants s'éloignait sans espoir de recueillir
quelques naufragés : ils n'avaient pas tenu plus de quatre minutes dans
l'eau glacée et leur équipement n'avait servi qu'à les transformer rapidement
en fantômes flottants.
C'est alors que, fidèle à sa promesse de faire l'impossible pour survivre,
elle sort de sa poche le sifflet offert quelques instants avant par un musicien.
Ce dernier avait joué du violon jusqu'à ce que les flots engloutissent le
bateau, coupé en deux, dressé la verticale, hélices hors de l'eau.
Pour lors, rassemblant toutes les forces qui lui restaient, elle souffle,
souffle désespérément pour faire tourner la roulette dans l'instrument. Le
calme effrayant de cette nuit dramatique s'en trouve dérangé ; elle finit
par se faire entendre et a obtenir l'aide indispensable à son salut.
Vous trouverez, j'en suis sûr, d'autres utilisations de cet instrument peu
encombrant… mais, au moment où un nouveau paquebot, le plus grand du monde,
entre en chantiers à Saint Nazaire, il serait peut-être opportun de penser
à en équiper les trois mille futurs passagers...
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